La transition vers une économie plus durable et à faibles émissions de carbone a placé les batteries au cœur des préoccupations européennes. Considérées comme un élément essentiel de la décarbonisation et de l’électrification des transports, les batteries font désormais l’objet d’une réglementation européenne renforcée visant à en améliorer la durabilité, la sécurité et la traçabilité sur l’ensemble de leur cycle de vie. Le nouveau règlement (UE) 2023/1542, entré en vigueur en février 2024, marque une étape majeure dans la construction d’une filière des batteries plus responsable et plus compétitive au niveau européen.
Champ d’application élargi et nouvelles catégories de batteries
Le règlement (UE) 2023/1542 élargit considérablement le champ d’application de la réglementation européenne sur les batteries. Alors que la directive 2006/66/CE se concentrait principalement sur les piles et accumulateurs portables, le nouveau texte s’applique désormais à l’ensemble des catégories de batteries, y compris les batteries destinées aux véhicules électriques, aux moyens de transport légers (trottinettes, vélos électriques, etc.) et aux applications industrielles. Cette évolution permet de couvrir l’intégralité du marché des batteries au sein de l’Union européenne.
Exigences renforcées en matière de durabilité, de sécurité et d’information
Le règlement impose de nouvelles exigences en matière de durabilité, de sécurité et d’information pour toute batterie mise sur le marché ou mise en service. Ces dispositions visent à garantir un niveau élevé de performance et de fiabilité des batteries, tout en améliorant la transparence pour les consommateurs et les utilisateurs finaux.
Durabilité et sécurité
Parmi les principales mesures, on peut citer l’introduction de critères de performance et de durabilité spécifiques selon les catégories de batteries, des restrictions sur l’utilisation de substances dangereuses comme le mercure, le cadmium ou le plomb, ainsi que des exigences en matière d’empreinte carbone et de contenu recyclé. La facilité de retrait et de remplacement des batteries, notamment pour les appareils portables et les moyens de transport légers, est également une nouveauté importante.
Étiquetage et information
Le règlement prévoit également des obligations renforcées en matière d’étiquetage et d’information, avec la mise en place d’un « passeport de batterie » électronique. Celui-ci permettra de mieux suivre et tracer les batteries tout au long de leur cycle de vie, depuis leur fabrication jusqu’à leur fin de vie.
Devoir de diligence et responsabilité élargie des producteurs
Afin de prévenir les risques sociaux et environnementaux liés à la production et à l’utilisation des batteries, le règlement introduit un « devoir de diligence » pour les opérateurs économiques mettant des batteries sur le marché. Ceux-ci devront mettre en place des politiques et des systèmes de gestion des risques, vérifiés par des tiers.
Par ailleurs, le texte consacre la responsabilité élargie des producteurs, en étendant leurs obligations à la gestion des déchets de batteries. Cela inclut des objectifs de collecte et de recyclage ambitieux, ainsi que la possibilité pour les acteurs de la seconde vie et du remanufacturage d’être considérés comme des producteurs.
Vers une économie circulaire des batteries
L’objectif affiché du règlement est de favoriser une véritable économie circulaire des batteries, depuis leur conception jusqu’à leur fin de vie. Outre les exigences en matière de durabilité, de recyclage et de réemploi, le texte prévoit des mesures spécifiques pour faciliter la collecte, le traitement et la valorisation des déchets de batteries.
Collecte et recyclage
Des objectifs de collecte sont ainsi fixés pour les différentes catégories de batteries, avec par exemple 63% de collecte pour les batteries portables d’ici 2027 et 51% pour les batteries des moyens de transport légers d’ici 2028. Des niveaux minimaux de recyclage sont également imposés, notamment 50% pour le lithium d’ici 2027.
Seconde vie et réemploi
Le règlement reconnaît également le rôle des acteurs de la seconde vie et du remanufacturage des batteries, en leur conférant le statut de « producteur ». Cela permettra de faciliter la réutilisation et le reconditionnement des batteries, contribuant ainsi à allonger leur durée d’utilisation.
Le recyclage des batteries au plomb
Processus et réglementations
Le recyclage des batteries de véhicules à base de plomb est une démarche indispensable pour la protection de l’environnement et la valorisation des ressources. En France, le décret n°99-374 du 12 mai 1999 et l’arrêté du 26 juin 2001 imposent aux fabricants et revendeurs de collecter les batteries au plomb usagées et de les acheminer vers des sites de récupération.
Le processus de recyclage commence par le stockage approprié des batteries, qui doivent être placées à l’endroit dans des bacs étanches munis de couvercles ou de systèmes de rétention. Ensuite, les batteries sont vidées de leur acide, lequel est neutralisé dans des installations spécialisées. Les batteries sont ensuite broyées pour séparer les différents composants : le plomb, le plastique et autres matières. Le plomb récupéré est fondu et réutilisé, tandis que le polypropylène constituant l’enveloppe plastique est lavé puis transformé en granulés servant à fabriquer de nouveaux emballages, notamment pour le secteur automobile.
Ce processus permet de recycler jusqu’à 92 % des matériaux d’une batterie au plomb, avec un taux de récupération atteignant 98 % pour le plomb.
Ainsi, le recyclage des batteries au plomb contribue significativement à la réduction des déchets dangereux et à la préservation des ressources naturelles, tout en s’inscrivant dans une démarche d’économie circulaire durable.
Un passeport de batterie pour une meilleure traçabilité
Parmi les innovations majeures du règlement figure la mise en place d’un « passeport de batterie » électronique. À partir de 2027, les batteries les plus importantes (véhicules électriques, moyens de transport légers, batteries industrielles de plus de 2 kWh) devront être associées à cet enregistrement numérique, permettant d’en assurer la traçabilité tout au long de leur cycle de vie.
Ce passeport contiendra des informations détaillées sur les caractéristiques techniques de la batterie, son historique d’utilisation, ses opérations de réemploi ou de remanufacturage, ainsi que des indications sur son démontage. Une telle mesure vise à garantir la transparence et à faciliter la gestion de la fin de vie des batteries.
Vers une industrie européenne des batteries plus compétitive et durable
Au-delà de ses aspects environnementaux, le nouveau cadre réglementaire européen sur les batteries vise également à renforcer la compétitivité de l’industrie du secteur sur le continent. En harmonisant les exigences de sécurité, de durabilité et d’information, le règlement (UE) 2023/1542 contribue à créer des conditions de concurrence plus équitables pour tous les acteurs.
Cette évolution réglementaire s’inscrit dans une dynamique plus large de développement d’une filière européenne des batteries, soutenue par des investissements massifs dans la recherche, l’innovation et les capacités de production. L’objectif est de faire de l’Europe un acteur de premier plan sur ce marché stratégique, tout en garantissant le respect de normes environnementales et sociales ambitieuses.
Vers une meilleure prise en compte des enjeux sociaux et environnementaux
Au-delà des aspects techniques et économiques, le nouveau règlement européen sur les batteries accorde une place centrale aux défis sociaux et environnementaux liés à ce secteur. Le devoir de diligence imposé aux opérateurs économiques vise ainsi à prévenir et à gérer les risques tout au long de la chaîne d’approvisionnement, depuis l’extraction des matières premières jusqu’à la fin de vie des produits.
De même, les objectifs ambitieux en matière de collecte, de recyclage et de réemploi des batteries permettront de réduire l’impact environnemental de ce secteur stratégique, tout en favorisant une utilisation plus durable des ressources. Cette transition écologique de l’industrie des batteries s’inscrit pleinement dans les objectifs de décarbonisation et de préservation des écosystèmes fixés par l’Union européenne.
Conclusion
Le règlement (UE) 2023/1542 sur les batteries et les déchets de batteries marque une étape décisive dans la construction d’une filière européenne plus durable, sûre et compétitive. En harmonisant les exigences techniques, en renforçant les obligations des opérateurs économiques et en favorisant l’économie circulaire, ce nouveau cadre réglementaire pose les bases d’un développement responsable des batteries, élément clé de la transition écologique et énergétique de l’Europe.
Alors que la demande de batteries ne cesse de croître, notamment dans les secteurs de la mobilité et du stockage d’énergie, cette évolution réglementaire permettra de garantir un approvisionnement en batteries fiables, sûres et respectueuses de l’environnement. Elle contribuera ainsi à faire de l’Europe un leader mondial dans ce domaine stratégique, tout en répondant aux enjeux sociaux et environnementaux liés à cette filière.