Chaque année, près de 1,5 million de véhicules hors d’usage (VHU) apparaissent en France, générant une quantité considérable de déchets potentiellement dangereux pour l’environnement. La gestion de ces VHU représente donc un enjeu majeur en termes de protection de l’environnement et de transition vers une économie circulaire. Heureusement, un cadre réglementaire solide et l’engagement des acteurs de la filière permettent aujourd’hui de relever ce défi.
Comprendre les enjeux des VHU
Définition et composition des VHU
Un véhicule hors d’usage (VHU) est un véhicule que son dernier détenteur destine à la destruction. Qu’il conserve ou non une valeur commerciale, un VHU est considéré comme un déchet dangereux tant qu’il n’a pas subi une dépollution complète et rigoureuse. En effet, ces véhicules contiennent de nombreux éléments liquides et solides classés dans cette catégorie, tels que les huiles, les filtres, les batteries au plomb, les fluides de climatisation, etc.
Enjeux environnementaux et économiques
La gestion inadéquate des VHU représente une menace sérieuse pour l’environnement. Le stockage ou le traitement de ces véhicules dans de mauvaises conditions peut entraîner la pollution des sols et des eaux. C’est pourquoi il est essentiel que les VHU soient pris en charge par des professionnels agréés, capables d’assurer leur dépollution complète et leur traitement dans le respect de l’environnement.
Sur le plan économique, la filière de déconstruction automobile représente également un enjeu important. En effet, les VHU contiennent de nombreux matériaux, pièces et composants qui peuvent être réutilisés, recyclés ou valorisés, contribuant ainsi à l’économie circulaire.
Les différentes étapes de la destruction
La première étape consiste à dépolluer le véhicule, c’est-à-dire à en retirer tous les liquides nocifs tels que l’huile, le carburant et les liquides de refroidissement. Ensuite, le véhicule est démonté pour récupérer les pièces encore utilisables. Les matériaux recyclables, comme le métal, le verre et le plastique, sont triés et envoyés dans les usines de recyclage appropriées.
Une fois que les pièces réutilisables et les matériaux recyclables ont été récupérés, le reste du véhicule est broyé et transformé en déchets solides. Ces déchets sont ensuite traités avec soin pour éliminer les substances toxiques et les résidus dangereux. Enfin, le matériau résultant est recyclé ou éliminé de manière écologique.
Le traitement des VHU est un processus complexe, mais grâce à ces étapes clés, nous pouvons minimiser l’impact environnemental de ces véhicules en fin de vie tout en récupérant soigneusement les matériaux réutilisables.
Cadre réglementaire et Objectifs
Directive européenne 2000/53/CE
Au niveau européen, la directive 2000/53/CE relative aux VHU encadre la gestion de ces véhicules. Elle vise notamment à promouvoir la conception de véhicules davantage valorisables, à réduire l’utilisation de substances dangereuses et à faciliter le démontage et le recyclage. Cette directive fixe également des objectifs en termes de réutilisation, de recyclage et de valorisation des VHU.
Transposition en droit français
En France, le cadre réglementaire régissant la gestion de la fin de vie des véhicules est défini par les articles R. 543-153 et suivants du Code de l’environnement. Parmi les principales dispositions, on peut citer :
- L’obligation pour les détenteurs de VHU de les remettre à des centres VHU agréés
- L’obligation pour ces centres VHU de reprendre gratuitement les VHU
- L’obligation pour les constructeurs automobiles d’assurer la collecte et le transport sans frais des VHU
Objectifs de performance
La directive européenne fixe des objectifs ambitieux en termes de réutilisation, de recyclage et de valorisation des VHU. En 2021, la France a ainsi atteint un taux de réutilisation et de recyclage de 87,6% et un taux de réutilisation et de valorisation de 95,7%, dépassant les objectifs européens.
Rôle et obligations des acteurs
Démolisseurs et broyeurs agréés
La filière de déconstruction automobile s’appuie sur un réseau d’environ 1 700 centres de traitement de VHU et 60 broyeurs agréés. Ces acteurs jouent un rôle essentiel dans la gestion des VHU :
- Les démolisseurs assurent la dépollution des véhicules, récupèrent les pièces détachées réutilisables et cèdent les carcasses aux broyeurs.
- Les broyeurs effectuent le broyage des véhicules, permettant de séparer les différents matériaux (métaux, plastiques, etc.) en vue de leur recyclage.
Tous ces opérateurs doivent être agréés par les pouvoirs publics et respecter un cahier des charges strict en termes de dépollution, d’entreposage et de valorisation des déchets.
Obligations des détenteurs de VHU
Conformément à la réglementation, les détenteurs de VHU (particuliers, garagistes, assureurs, etc.) ont l’obligation de remettre leurs véhicules à des centres VHU agréés. Ceux-ci doivent reprendre gratuitement les VHU qui leur sont remis.
Rôle des constructeurs automobiles
Les constructeurs automobiles jouent également un rôle important dans la filière VHU. Ils sont notamment tenus d’assurer la collecte et le transport sans frais des VHU depuis leur lieu de détention jusqu’aux centres VHU agréés.
Évolution de la réglementation
Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC)
La loi AGEC de février 2020 a permis de faire évoluer le cadre réglementaire de la filière VHU. Elle a notamment étendu la responsabilité élargie des producteurs (REP) à de nouvelles catégories de véhicules, comme les motos, les quads et les voiturettes.
Décret du 24 novembre 2022
Le décret du 24 novembre 2022 a précisé les modalités de mise en œuvre de cette REP. Il prévoit notamment :
- La suppression des agréments préfectoraux des centres VHU et des broyeurs en 2025
- L’obligation de contractualisation entre les producteurs de véhicules et les opérateurs de traitement en 2024
- L’interdiction de la mise en décharge de certaines fractions non métalliques à partir de 2025 (2030 pour l’Outre-mer)
Performances de la filière
Taux de réutilisation, recyclage et valorisation
Grâce aux efforts des acteurs de la filière, la France a réussi à atteindre les objectifs européens en matière de réutilisation, de recyclage et de valorisation des VHU. En 2021, le taux de réutilisation et de recyclage s’est établi à 87,6%, tandis que le taux de réutilisation et de valorisation atteignait 95,7%.
Prévention et gestion des VHU en outre-mer
Cependant, des défis persistent, notamment dans les collectivités territoriales d’outre-mer, où le nombre de VHU abandonnés est particulièrement élevé. Pour y remédier, les constructeurs automobiles ont mis en place un plan d’actions volontaire, permettant de collecter et de traiter près de 39 000 véhicules abandonnés depuis 2018.
Pièces de rechange issues de l’économie circulaire
Réglementation sur l’information du consommateur
Depuis 2017, les consommateurs doivent être informés de la possibilité d’utiliser des pièces de rechange issues de l’économie circulaire lors de l’entretien ou de la réparation de leur véhicule. Cette mesure, issue de la loi de transition énergétique, vise à favoriser la réutilisation des biens et à réduire les coûts pour les consommateurs.
Pièces sécurisées et tracées
Les pièces détachées issues de l’économie circulaire sont celles provenant des centres VHU agréés ou ayant fait l’objet d’un processus de remise en état selon la procédure d’échange standard. Elles sont sécurisées et tracées, garantissant ainsi leur qualité et leur provenance.
Perspectives et défis à relever
Renforcement de l’écoconception des véhicules
Afin de faciliter le traitement des VHU, les pouvoirs publics et les constructeurs automobiles travaillent sur l’amélioration de l’écoconception des véhicules. L’objectif est de concevoir des véhicules davantage valorisables, avec une moindre utilisation de substances dangereuses et une meilleure possibilité de démontage et de recyclage.
Lutte contre la filière illégale
Malgré les progrès réalisés, un tiers des VHU échappe encore à la filière légale de traitement. La lutte contre cette filière illégale, qui peut entraîner de graves dommages environnementaux, représente donc un défi majeur pour les années à venir.
Développement de l’économie circulaire
Enfin, la filière VHU s’inscrit dans une dynamique plus large de transition vers l’économie circulaire. Le développement de la réutilisation, du recyclage et de la valorisation des matériaux issus des VHU contribue à préserver les ressources naturelles et à réduire l’impact environnemental du secteur automobile.
Le mot de fin …
La gestion des véhicules hors d’usage représente un enjeu environnemental et économique majeur. Grâce à un cadre réglementaire solide et à l’engagement des acteurs de la filière, la France a réussi à atteindre les objectifs européens en matière de réutilisation, de recyclage et de valorisation des VHU. Cependant, des défis persistent, notamment dans les territoires d’outre-mer et en ce qui concerne la lutte contre la filière illégale. L’amélioration de l’écoconception des véhicules et le développement de l’économie circulaire autour des VHU constituent également des pistes prometteuses pour l’avenir.